Où va l'argent de votre abonnement à Spotify, Apple, Deezer...?

24 novembre 2020 à 10h01 par Christophe HUBERT

RADIO FG
Crédit : @kaboompics / Pexels

On reparle de la rémunération des artistes par les géants du streaming, Spotify en tête…

Tous en guerre contre Spotify ! Il y a quelques jours, une nouvelle pétition d’artistes américains relançait le débat sur leur rémunération par les plateformes de streaming musicale, Spotify en tête. Sous-payés, exploités, on connaît l’idée… sauf que dans le détail, c’est plus compliqué.

On sait combien sont payés les artistes justement ?

Spotify dit prendre 30% du total des abonnements. Les 70% restants sont donc redistribués aux artistes, premier élément qui discrédite l’idée que les plateformes de streaming sont des rapaces, se nourrissant sur le dos des artistes.
La vraie question c’est plutôt celle du mode de redistribution de l’argent générés par les abonnements et la publicité. Et là, plusieurs logiques s'affrontent, celles d'une multitude des données ou celle de la simplicité, reposant sur notre consommation.

Aujourd’hui comment ça se passe quand j’écoute de la musique sur Spotify par exemple ?

Si vous écoutez 5 fois David Guetta et 5 fois Angele, l'argent de votre abonnement (ou de la pub) ne sera pas réparti de cette façon, une moitié pour l’un, une moitié pour l’autre. Car le système actuellement en vigueur est plus grossier : on prend tout l’argent généré par les abonnements et on le répartit ensuite sur les artistes selon divers critères comme le nombre de clics, leur notoriété, etc… On appelle cela le « data centric ».
Dis autrement : si vous n’écoutez que des jeunes talents inconnus ou de la flûte traversière, vous enrichirez quand même Aya Nakamura et Ariana Grande !

Donc c’est le système actuel qui est injuste et inéquitable ?

Oui, car il favorise les « gros » artistes – les plus connus – mais aussi les scènes les plus fortes (actuellement celles des musiques urbaines), au détriment des nouveaux talents, de scènes plus confidentielles (le jazz par exemple).

Et là, ce sont moins les plateformes de streaming qui bloquent que les ayant droits des artistes, aux intérêts divergents. Les labels indépendants voudraient ainsi revoir le mode de répartition, les majors comme Universal, Sony, Warner n’ont pas trop envie de taper sur un système qui malgré tout, génère beaucoup d’argent. Rappelons que le streaming musical en France, pèse plus de 330 millions d’euros.

Mais y’a-t-il d’autres systèmes possibles pour mieux rémunérer les artistes ?

Potentiellement, tout est possible. Et il y a une plateforme prête à tester autre chose - elle est française, c’est Deezer. Elle propose d’en finir avec le système actuel, en se basant sur l’utilisateur (on appelle cela le « user centric ») : l'argent de votre abonnement serait réparti sur la base de votre consommation de musique et servirait alors à rémunérer les artistes que vous avez effectivement écouté.

Cela semble évident et être la parfaite bonne idée… mais rien n’est prouvé ! Une récente étude lancée par le CNM (Centre National de la musique, fraîchement créé), montre au contraire qu’aucun système de rémunération des artistes n’est parfait. Calculer la répartition selon votre consommation, ne résoudra probablement rien aux problèmes des jeunes talents ou des scènes émergentes. Et certains acteurs du monde de la musique plaident pour d'autres systèmes basés, par exemple, sur la durée d'écoute pour éviter le phénomène fréquent chez le jeune public de l'écoute en boucle du même morceau. 

Mais le test de l'user centric, mérite d’être fait…

Oui, tester autre chose que le système actuel est une bonne idée, mais ce sera le début d’une histoire et non pas une fin en soi.
Car l’explosion du streaming a aiguisé des appétits contradictoires entre majors et petits labels, artistes stars et jeunes talents, musiques urbaines et scènes émergentes et même entre jeunes et vieux, car la consommation de musique diffère évidemment avec l’âge.

Autrement dit, le salaire des artistes sur Spotify ou ailleurs, vous n’avez pas fini d’en entendre parler !