La santé mentale des DJs, toujours taboue ?

26 janvier 2023 à 12h22 par Christophe HUBERT

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Crédit : @dan-meyers / unsplash

La santé mentale des DJs, toujours taboue ?

« Ça va parfaitement », « je suis au top », « que du bonheur »… Parlez à un DJ – n’importe lequel – et il vous répondra invariablement que tout va bien. Car, the show must go on ! Car c’est un métier d’images et de paraître.

Mais dernièrement, un artiste de renommée mondiale a montré que, si la santé mentale des DJs restait un tabou, il était possible de le briser. Skrillex est revenu sur sa longue absence, son long silence que beaucoup avaient attribué à la préparation d’un album. Il n’en était rien. Le producteur a révélé, dans une série de tweets, qu’il avait eu besoin de travailler sur lui-même. « J'ai eu l'année la plus difficile de ma vie, comme tant d'autres. Je me suis littéralement retrouvé sans motivation ni but pour la première fois de ma vie ». Skrillex évoque également la mort de sa mère en 2015 qui l'a vu se tourner vers l'alcool pour évacuer la douleur.

Mais si l’Américain n’en parle que maintenant, c’est probablement parce qu’il va mieux : « Pour la première fois en 4-5 ans, j'ai trouvé un nouveau sentiment de paix. », ajoutant "Il a fallu du travail et des sacrifices pour en arriver là". D’où la sortie du « Rumble » avec Fred Again ou encore de « Way Back ».

Comment ne pas penser à Avicii, le DJ suédois qui s’est donné la mort en 2018, après des années de souffrances, une phobie de la scène et un enfermement dans l’alcool, seule façon pour lui d’affronter les obligations liées à un artiste de son rang (tournées, promotion, voyages, etc…). On pense aussi à ces artistes dont on nous dit, en off, qu'ils sont en dépression, en burn-out, accablés par le rythme infernal ou l'échec d'un single.

De fait, la santé mentale des artistes et des DJs est donc taboue dans notre société. Et on ne voit pas pourquoi il en serait autrement puisque nous sommes tous et toutes concernés par ce même problème, ce même défi de santé publique.

Dans le 7e volet de l'Observatoire mené l'an dernier par Santéclair, un sondage Harris Interactive montrait que plus de 8 français sur dix (81%) avaient eux-mêmes été touchés à un moment ou un autre de leur vie par des troubles et souffrances psychologiques. 65% disaient en éprouver actuellement.

On entend par troubles, ceux liés au sommeil, aux sentiments de déprime (expérimentés par 43% des français), crises d’anxiété (36%) ou idées sombres (30%). La crise du Covid 19 est passée par là, renforçant souvent ces troubles psychologiques. Les artistes n’échappent donc pas à ce mal des sociétés modernes, observable dans de très nombreux pays du monde.

Et c’est d’autant plus difficile pour les métiers d’images, pour ces artistes qui doivent en permanence faire bonne figure. Sur le plateau de l’Happy Hour FG, en interview ou sur scène en concert, à l’aéroport devant les fans, dans la rue posant des selfies, etc… Depuis la nuit des temps, l’artiste renvoie une image de réussite, mieux, une expérience mythifiée de la perfection.

Si un DJ, un chanteur, une chanteuse me fait me sentir mieux – rien qu’à l’écoute – ai-je envie de l’entendre me raconter ses problèmes ?
Probablement pas. Ceci dit les choses changent, (depuis la mort d’Avicii notamment) se propage l’idée qu’il faut parler, qu’il faut dire, décrire. Et les récents messages de Skrillex s’inscrivent dans cette démarche. Elle est sûrement bonne pour lui, elle l’est aussi pour nous. 29% des français éprouvant des souffrances psychologiques déclarent avoir du mal à en parler voire n’acceptent pas de se faire aider. Que des artistes en parlent - par le rôle symbolique qui est le leur - incitera certainement d'autres personnes à le faire. Merci Skrillex.

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